“ Notre start-up a 40 ans ! ”
De 7 collaborateurs à 70 000
Depuis 1976, Decathlon innove pour rendre le sport accessible avec un esprit avant-gardiste. En 2016, qui d’autre mieux que les fondateurs de l’enseigne nordiste, devenue internationale et passée de 7 à 70 000 collaborateurs, pouvaient raconter cette esprit d’entreprenariat partagé ? Une plongée dans le passé qui nous propulse vers l’avenir. Présentations et (re)découvertes...
C’est l’été 1976 et la France retient son souffle. La canicule brûle champs et poumons. Soleil éternel et ciel sans nuages, thermomètre au plus haut… Si la météo régale les premiers estivants, les agriculteurs recherchent l’eau. Mais, entre températures caniculaires et plaisirs de vacanciers, le pays s’est pris de passion pour le sport. Les footballeurs de l’AS Saint-Etienne ont repeint la France en vert avec leur épopée européenne. Guy Drut est en train de hisser le drapeau tricolore tout en haut de la planète de l’athlétisme et de l’olympisme. Il est en route vers Montréal où les JO l’attendent et… une médaille d’or aux 110 mètres haies. Un jeune cycliste breton au tempérament de braise, Bernard Hinault, empile les titres en amateur et, sous l’égide de son nouveau directeur sportif Cyril Guimard, va briller de mil feux dans le peloton professionnel.
Le sport commence à prendre une place de choix dans un pays où la démocratisation de la pratique s’accélère. C’est l’essor des clubs et des associations liés au sport, dans un pays comptant alors 7 millions de licenciés en club, notant d’ailleurs une progression annuelle de 6%.
Du rond à l’ovale, les Français se découvrent ou se redécouvrent des envies et des passions. Ainsi, les supporters du XV de France ont savouré la victoire des Bleus sur les Anglais (30-9) dans le Tournoi des V Nations. Certes, le golf ou le ski demeurent réservés à une minorité mais, en octobre 1975, la loi Mazeaud sur le développement de l'éducation physique et du sport, a été adoptée. Désormais, le développement de la pratique des activités physiques et sportives constitue une obligation. Ces activités deviennent parties intégrantes de l'éducation, et sont inscrites dans tous les programmes de formation. C'est la reconnaissance du droit au sport. La société se sent des fourmis dans les jambes, et lever les genoux pour courir n’empêche pas de lever la tête pour créer, voyager et s’évader. Au contraire…
Le Concorde a effectué sa première liaison Paris – Rio le 21 janvier, un avion supersonique dont Air France est très fier. Les premiers vainqueurs du Loto National, lancé en mai, peuvent d’ailleurs dépenser leurs gains jusqu’aux Amériques. Le jackpot, aux Etats-Unis, Sylvester Stallone va bientôt le toucher en lançant le premier de ses films Rocky. La saga est lancée. Pour d’autres aussi, le gros lot n’est pas loin… Le 1er avril 1976, Steve Jobs et Steve Wozniak ont commercialisé l’Apple-1, leur tout premier ordinateur. Sport et innovation… il en est justement question dans un petit coin du Nord de l’Hexagone.
“ On était des fous dingues ! ”
L’aventure commence sur le parking du centre commercial Auchan d’Englos, une commune située à une vingtaine de kilomètres de Lille… Ils sont alors une poignée à œuvrer et à s’activer. Sept entrepreneurs. Les maçons-architectes sont enthousiasmés par la vision de Michel. Benoît, Didier, Hervé, Nicolas, Stanislas et Stéphane la suivent avec passion, déjà. Tous sont férus de sport et partagent un enthousiasme débordant. Une start-up est en train de naître… Après avoir séduit les sportifs français, elle va faire le tour du monde, mais ceci, la bande des Sept n’en a pas encore tout à fait conscience.
Qui sont les fondateurs de Decathlon ?
Ils ont une vingtaine d’années, ils sont jeunes, enthousiastes, sportifs, parfois amis et souvent inexpérimentés dans la grande distribution. Salaire d’embauche : 2 200 francs mensuels pour les célibataires, 2 400 francs pour les jeunes mariés. La demi-douzaine de talents recrutée par Michel Leclercq se lance dans l’aventure avec le patron. Le sport est la passion commune de la bande. Didier Decramer est un cavalier émérite, Stéphane Delesalle, champion de hockey-sur-gazon ayant fait son service militaire au Bataillon de Joinville, Nicolas Dubrulle, pratique le tennis, la voile et surtout le football, Stanislas Ernoult raffole de la planche à voile, Hervé Valentin est accro de tennis, de ski et de voile tout comme Benoît Poizat. Tout pour plaire à Michel Leclercq, fan de randonnée, de vélo et de voile. « Dès qu’on en avait la possibilité, on faisait du sport ensemble, se rappelle Didier Decramer. Au début nous n’ouvrions le magasin que l’après-midi, alors le matin on se retrouvait pour faire du sport ensemble. » Le succès commercial va bouleverser le planning mais n’effritera pas leur passion sportive. « Cela a duré trois ou quatre mois, et après on a fini par ouvrir dès le matin. Mais il y avait le dimanche pour le sport… » sourit Benoît Poizat. Et la semaine pour se dépenser au service des clients.
Decathlon a-t-il tenté d’autres aventures en dehors du sport ?
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1976 - 2016 : la passion de la transmission
Michel Leclercq :
« Tu as une idée, j’en ai une… nous en avons trois ! »
Raconter Michel Leclercq, c’est dérouler l’histoire d’une vision. Le petit-fils de Louis Mulliez, fondateur des filatures de Saint-Liévin au début du siècle dernier et patriarche du groupe industriel éponyme, s’émancipe de l’entreprise familiale au milieu des années 1970 où il s’occupe de l’informatique chez Auchan. Il a 35 ans en 1975 et veut créer un nouveau modèle de grande distribution. « Il songeait aux livres et au sport comme terrains à défricher. » rapporte un proche. Michel ne deviendra pas libraire, puisque son choix final se porte sur le sport. Réunir le plus d’activités sportives sous le même toit et proposer aux clients les prix les plus accessibles.
Michel possède la vision du projet, extrêmement novatrice pour l’époque. Il lui reste à passer à l’action. Il recrute en une semaine six jeunes collaborateurs. « Il nous a laissé devant une feuille blanche avec son idée : créer un magasin de sport où l’on vendrait pour le plus grand nombre avec une volonté de prix très attractifs », se souvient Benoît Poizat. « On a tout appris sur le terrain. Il a été notre professeur et en même temps nous a offert une liberté d’initiative totale. C’est le management par la confiance, l’ADN de Decathlon est là. »
Pour Michel Leclercq, ses collaborateurs sont aussi des bâtisseurs. Il a une dizaine d’années de plus qu’eux mais ses coéquipiers voient en lui un entrepreneur au management innovant. Il leur donne en effet le pouvoir de décider pour résoudre sur le champ les problèmes. Ils vont réfléchir (vite) tout en avançant (vite). Michel leur dit : « Tu as une idée, j’en ai une, nous en avons donc trois ! On y va… ». Quand il postule à une embauche en 1978, Gérard Allenet est reçu en entretien par Michel Leclercq : « On parle et d’emblée il me dit : ‘’Dans 3 ans on aura 30 magasins.‘’ Cette vision m’a plu.
La perspective d’évolution était évidente. C’était motivant. La vision, une volonté forte de développer l’entreprise. Ca donnait envie ! ». La success story ne se démentira pas car, toujours, et à travers les décennies, la transmission de la passion animera les équipes. « Dès le départ, Michel m’a dit : ‘’Tu conseilles les clients comme si c’étaient tes meilleurs potes. Pas besoin de charger la barque. Et surtout on n’a pas le droit de dire non à un client.” » rappelle Benoît Poizat.
Le pouvoir de dire « Oui » qui existe toujours en 2016…
Le management à la Decathlon est aussi en place dès les premières heures de l’aventure. « Michel nous disait : ‘’Recrutez plus fort que vous ! Choisissez des gens qui ont la niaque et qui sauront prendre votre place en faisant mieux encore’’ ajoute Didier Decramer. Si vous voulez être une entreprise qui se développe, il faut fabriquer des patrons. Si vous embauchez un vendeur, il peut être un futur patron de magasin, etc… Michel dit toujours, pour s’amuser, qu'il a fait les grandes écoles d'ingénieurs et de commerce pour montrer que pour lui c’est le terrain qui prime. Tout ce qu'il a appris à travers les autres et ce qu'il nous a incluqué vaut tous les diplômes de la terre ! ». Incubateur d'idées et d'énergies, Michel Leclercq a ainsi créé les conditions de réussite d'une éternelle start-up, dont le Président est aujourd’hui Matthieu Leclercq.
Le but de la journée n'est pas d'avoir fait le plus gros chiffre d'affaires, mais de voir revenir nos clients dans six mois, dans un an. Il est interdit de tromper un client chez DECATHLON.
9 999 francs et une paire de chaussettes,
ou le goût de la compét'...
Ces Pionniers, bourrés d’énergie, de bon sens, et passionnés par le client et le commerce se démènent pour que s’ouvre en temps et heure le tout premier… Decathlon. Ce magasin originel ouvrira ses portes le 27 juillet 1976. Il apparaît vite très original.
Si l’ouverture d’une surface de vente dédiée exclusivement au sport pour le plus grand nombre apparaît comme une évolution pour Michel Leclercq et ses compagnons de route, pour les pratiquants de sport, Decathlon deviendra bientôt le nom synonyme de vraie révolution. Qu’est-ce qui rend finalement le concept si attractif pour les premiers clients et les curieux, vite nombreux ? Pour la première fois, en un seul et même magasin, les clients peuvent trouver un très large choix d’équipements sportifs à prix très compétitifs. C’est une première dans le monde de la distribution. Dans les rayons, côte à côte, le textile et les chaussures pour le football, les maillots de bain, les balles de tennis ou les articles de pêche, de chasse, les vélos et le matériel d’équitation... Du jamais vu. Une vraie nouveauté, également. Car le désir de Michel Leclercq et de ses pionniers de rendre la pratique du sport accessible au plus grand nombre en proposant des solutions à petits prix est, pour l’époque, inédit. Mais le rêve des pionniers d’Englos devient peu à peu réalité pour des milliers, puis des millions de Français...
Ce 27 juillet 1976, premier jour de commerce, Michel et ses jeunes collaborateurs guettent les clients. Le magasin a ouvert sans grande publicité, au fond du parking du centre commercial. Peu à peu, au cours de la journée, les pratiquants entrent. Englos, les communes alentours, Lille… le bouche-à-oreille commence à faire son effet. Et le concept plaît d’entrée. « A 19 heures, quand on a fermé les caisses et baissé le rideau, nous avons vite compté notre recette : 9 999 francs ! », se souvient Benoît Poizat. Les sept, en bons sportifs et compétiteurs, commerçants dans le sang, ne peuvent laisser la somme en l’état. « Pour obtenir le chiffre rond de 10 000 francs, on a acheté une paire de chaussettes ! » rigole aujourd’hui Benoît. Le compte est bon. Il le sera le lendemain aussi. Et le surlendemain. Et les semaines, et les mois, et les années, et les décennies suivants. Car, dès ce 27 juillet 1976, Decathlon trouve son style, sa clientèle et prend son envol.
Englos, premier magasin : 6 mètres de plafond ou le pragmatisme fondateur
Pour lancer son projet, Michel Leclercq installe sa petite équipe de collaborateurs dans une maison prêtée par ses cousins, sur la zone commerciale d’Englos, au sud-ouest de Lille, où se trouve déjà un Auchan. C’est là que Michel et ses partenaires de jeu travaillent, et là que le tout premier magasin, d’une superficie de 900 mètres carrés, sort de terre. « J’étais chargé de sa réalisation. Je n’y connaissais rien, raconte Benoît Poizat, missionné par Michel Leclercq pour superviser le chantier. Ce premier magasin, je l’ai fait un peu trop bas : trois mètres sous poutres. On voyait des clients baisser la tête en entrant ! Pour le deuxième à Roncq, un an et demi plus tard, j’avais un peu plus d’expérience. Je me suis demandé, alors, à qui on pourrait revendre le bâtiment si on faisait faillite. A Roncq, où il y avait beaucoup de concessions automobiles, je me suis dit qu’on pourrait toujours revendre à un garage, si notre magasin était aux normes. Je suis allé chez Peugeot et j’ai demandé de mettre une voiture sur le pont. J’ai mesuré la hauteur maximum, il y avait 6 mètres. Voilà pourquoi depuis tous nos magasins font six mètres de haut. C’est le parti pris de l’analyse de terrain. Toujours pragmatique ! »
Pourquoi les vendeurs
Decathlon portent-ils un gilet ?
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Interview d’un pionnier : Decathlon en 4 questions
En cette année 2016, Decathlon fête son quarantième anniversaire. Mais l’histoire a emmené des dizaines de milliers de collaborateurs – plus de 15 000 en 2016 dans l’Hexagone – dans une aventure bien plus longue. Tout s’écrit au fil des ans dans le scénario d’une start-up sans cesse renouvelée, le secret de la réussite de Decathlon. De cette première équipe de « fous dingues » comme aime à le dire Benoît Poizat, la passion du sport – et la passion pour ses pratiquants - est restée intacte.
Tout n’a pas été simple, et les revers ont existé, bien sûr, mais chaque difficulté, alors comme aujourd’hui, est vue comme une opportunité. Une chance d’avancer, de progresser, de mieux faire. Et les exemples de rebond sont légion. « Les mois précédant l’inauguration du magasin, quand on recevait nos premiers fournisseurs, le bâtiment n’était pas encore construit. On les accueillait dans une maison délabrée. Il fallait les convaincre. S’ils arrivaient quand il avait plu, il fallait entrer par la fenêtre car la porte gonflait. On était répartis dans deux petites pièces à sept. A ce moment, notre premier magasin n’existe encore que sur les plans, mais notre esprit Decathlon est déjà une réalité » dit Benoît en un sourire complice.
En ce début d’été 1976, Stanislas Ernoult rentre, lui, d’un voyage autour du monde. Il entend parler du projet de Michel Leclercq par des amis sportifs et pose sa candidature. « J’avais fait trois ans d’études commerciales mais rencontrer Michel fut un formidable déclic. Il nous donnait d’entrée une énorme autonomie et nous obligeait à être pragmatiques, encore et toujours. » Les défis s’additionnent : le choix des produits, les relations avec les fournisseurs, les budgets et… la création du nom de l’enseigne. Car ce nom qui sonne si familier a demandé réflexion et a même entraîné des hésitations.
D’où vient le nom Decathlon ?
Pour trouver un nom à sa future chaîne de magasins, Michel Leclercq consulte ses collaborateurs. « On a enchaîné les brainstormings » se souvient Stanislas Ernoult. « On parlait, on lançait des noms. Michel faisait venir à ces réunions une personne spécialisée pour nous accompagner dans la réflexion.» Pentathlon, Triathlon, Decathlon, Marathon, Sportland, Sportmarché, etc… sont ainsi évoqués. Les noms défilent. « Je crois qu’il y en a eu plusieurs dizaines. On a pris notre temps. Finalement, Decathlon rappelait les dix sports principaux qu’on voulait présenter en magasin. » Ce sera donc Decathlon. « Mais, pour éviter qu’un éventuel concurrent s’empare plus tard d’autres noms que nous avions évoqués, on a déposé l’exclusivité sur tous les autres ! » poursuit Stan. Une décennie plus tard, le groupe développe de petites surfaces en centre-ville sous le nom de… Marathon avant que ces magasins deviennent aujourd'hui les boutiques Decat'.
Dès ses origines, l'enseigne décide de s'installer là où les clients le demandent, sous diverses superficies et sur divers terrains, mais elle conservera toujours son nom. Decathlon, qui devient synonyme de : "Tous les sports sous un même toit".
Le logo Decathlon est-il
le même depuis 1976 ?
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“ Sportifs satisfaits, c’est mon métier ! “
Une fois posées les fondations, il faut bien se lancer… Le rayon pêche pour Stanislas, la chasse pour Benoît, le vélo pour Stéphane, etc… Bienvenue en terre inconnue, mais en terrain connu. Car la philosophie, d’entrée, est claire : pour servir et accompagner le client en magasin, il faut pratiquer avec lui en dehors. Et la règle s’applique à tous les partenaires de Decathlon. « Michel m’a dit : ‘’Vas pêcher avec tes fournisseurs !’’ » rit encore Stan. Benoît, de son côté, convainc Manufrance de l’accepter pour découvrir les armes au cours d’un stage de 15 jours !
« Du choix et des prix très attractifs. C’était déjà rendre le sport accessible au plus grand nombre. On a appris qu’une tête de gondole, c’était empiler haut et vendre bas. Chaque jour, on s’adaptait. Aujourd’hui on parlerait d’une jeune start-up. Une vraie aventure. » La volonté d’entreprendre, d’apprendre : l’ADN de l’enseigne. C’est ce que Michel Leclercq répète dans les formations qu’il anime encore à Campus, le siège de Decathlon, auprès des collaborateurs, français ou internationaux. Une transmission à laquelle se livre également Benoît Poizat : « Regardez ce que je vous raconte et regardez ce que vous faites aujourd’hui, regardez les similitudes » explique Benoît. « J’interpelle toujours ces plus jeunes coéquipiers en leur demandant : ‘’Pratiquez-vous avec les passionnés de sport, à quelque niveau que ce soit ? Avez-vous encore en tête la défense du client, de son pouvoir d’achat ?’’ C'est ça qui fait que Decathlon gagne depuis 1976 et il est hors de question de lâcher cette volonté. Nos clients savent que nous sommes à leur côté sur ce point et tant d’autres comme l’innovation pratique et accessible, ils nous aiment pour cela et nous ne les abandonnerons jamais, jamais ! ».
Quand un client entre,
tu lui dis “Bonjour Monsieur” et tu lui donnes un sac.
Michel Leclercq
fondateur de Decathlon
En juillet 1976, le contact avec le client est déjà direct. Les cadres ont leur bureau dans… le magasin. « Une table sur une estrade au bout d’une rangée, décrit Stanislas Ernoult. Les clients venaient poser leurs questions tout de suite… » Sur le badge porté par les vendeurs, il est écrit : « Sportifs satisfaits, c’est mon métier. » Ce slogan se perpétuera… et le « satisfait ou satisfait » d’aujourd’hui est le prolongement naturel de ce premier leït motiv.
Le client est l’essentielle base. Mais, pour Decathlon et ses pionniers, tout le reste est à inventer… Le management, la publicité, la gestion. L’initiative et la confiance sont les vertus premières dans la jeune entreprise. La méthode Leclercq. « Il régnait une ambiance géniale entre nous » rappelle Didier Decramer. « On avait plaisir à venir au travail, à créer. Et puis on faisait aussi du sport tous ensemble ! ». Les séances de dépense physique et de partage collectif se déroulent le matin car le magasin d’Englos n’ouvre que l’après-midi, sauf les mercredi et samedi, jour des familles et des enfants. « Mais devant le succès du magasin, le sport matinal entre nous, ça n’a duré que six mois. Très vite on a ouvert toute la journée six jours sur sept » dit Benoît qui garde une tendresse pour son « pionnier fondateur ».
« Michel nous animait, nous formait, nous débriefait. Il nous disait : ‘’Premièrement, voici ta mission, elle est claire. A partir de là, l’objectif s’impose, ta stratégie se négocie, tes plans d’actions se délèguent. Deuxièmement, une fois ta mission écrite, tu y vas, j’ai confiance.’’ Dès le premier jour, j’ai d’ailleurs rédigé cette mission sur un cahier. Cette approche était la meilleure pour éviter le management de couloir. »
Benoît, en 1976, a 24 ans, n’a jamais construit de magasin. Il écoute, échange, et se lance. « J’ai finalement réussi. J’ai été cherché des tas de choses car la confiance donne des ailes. » Gérard Allenet, arrivé dans l’entreprise quelques mois après l’ouverture d’Englos, complète le tableau : « Je connaissais deux personnes qui travaillaient déjà dans ce magasin. J’étais un passionné de sport et j’ai vu la petite annonce de recherche d’un responsable de rayon, j’ai tenté ma chance. » Michel Leclercq cherche à recruter en fait un… responsable des services généraux. « Michel a été clair et m’a présenté sa vision des services généraux : comptabilité, nettoyage des toilettes, distribution des cabas à l’entrée du magasin, etc… J’ai dit banco ! ». Gérard va faire l’affaire. « Michel nous remontait comme des coucous : ‘’Il faut faire comme aux Etats-Unis : quand un client entre, tu lui dis ‘’Bonjour Monsieur et tu lui donnes un sac. Un, c’est un petit mot d’accueil et de respect, et deux, s’il peut remplir son sac c’est mieux.’’ Mon premier jour, j’ai fait exactement ça. » Apprendre en grandissant est la devise que les pionniers vont s’appliquer, et le virus du succès de cette start-up va bientôt être transmis à des dizaines, des centaines, des milliers d’autres collaborateurs.
Après avoir supervisé le chantier du premier établissement, le jeune Poizat est chargé de prospecter pour en ouvrir un deuxième, un an plus tard. « Je retiens deux possibilités sur Roncq (une commune proche de Lille), chacune d’elle à l’entrée du grand parking d’Auchan. Michel m’avait conseillé de faire une étude de marché un peu particulière, ou empirique. Le samedi, les deux pionniers visionnaires à l’esprit pratique filent à Roncq en voiture. Michel dit à Benoît : « Tu vas te mettre sur le pont de l’autoroute à cet endroit-là, je me mets de l’autre côté et on compte les voitures à chaque entrée. Dans deux heures, on se retrouve au bistrot d’à côté. » Benoît compte, décompte et va ensuite se poser au troquet. « Michel débarque et me lance : ‘’T’as combien de voitures?’’ Je lui réponds : 690. Lui en a 420. ‘’Bon, l’étude de marché est terminée ! Tu sais quel terrain tu dois acheter maintenant !’’. Je suis allé voir l’agriculteur et je lui ai acheté son champ. C’est du bon sens terrien : au plus près de la réalité ! ».
Partout, très vite et tout le temps, Decathlon bouscule les codes, séduit la clientèle et fait lever les sourcils des fabricants d’articles de sport. Benoît Poizat : « Quand nos fournisseurs voyaient notre politique de prix imbattables, certains nous boycottaient. On a ouvert en juillet, en août les rayons étaient presque vides. On mettait des affichettes pour expliquer que les fournisseurs ne voulaient pas nous livrer parce que l’on ne vendait pas assez cher. On tenait déjà un message de défense du client.» Michel Leclercq demande à ses collaborateurs de les poursuivre en justice pour refus de vente. Les procédures s’accumulent, les succès aussi.
Ce sera le cas pour remplir le rayon… skis. En début de saison hivernale, le responsable du rayon montagne attend désespérément sa commande passée chez un fabricant connu et reconnu. Dans les magasins de sport du centre-ville de Lille, les skis de cette marque sont déjà en rayons.
« On apprend alors par un commerçant que cette marque affirme ne pas vouloir livrer Decathlon, raconte Benoît Poizat. Alors, on loue une camionnette, on file sur Paris et on va acheter dans un magasin spécialisé quasiment tout le stock en bénéficiant d’une remise en se faisant passer pour un club. On installe tout en magasin à Englos et on appelle la marque en disant : ‘’On a appris que vous n’alliez pas nous livrer… seul problème : notre magasin est déjà plein de vos skis.’’ On ajoute : ‘’Si vous n’honorez pas notre commande, la semaine prochaine, on passe une pub dans le journal pour vendre tous vos skis à prix d’achat !’’. Trois jours après, on était livré mais on a appris à se battre. »
La bande d’irréductibles Nordistes résiste et se fait connaître par des techniques et méthodes de communication et de publicité peu orthodoxes, mais efficaces.
Quel a été le tout premier produit vendu sous le nom de Decathlon ?
Officiellement, c’est en 1986 qu’apparaissent les premiers produits Decathlon. Créés, conçus, fabriqués par l’entreprise. C’est, de fait, le début de la saga des Marques Passion. Dès l’ouverture en 1976, Decathlon propose en réalité un produit siglé au nom de l’enseigne : le vélo Decathlon, que l’on voit encore rouler parfois dans les rues. « D’entrée, les fabricants ne voulaient pas nous vendre leurs produits » rappelle Benoît Poizat. On a mené toutes les procédures et, un par un, ils ont accepté. » Devant les refus initiaux de fabricants majeurs, interloqués par la marge réduite pratiquée par Decathlon, Stéphane Delesalle, responsable du rayon cycles du premier magasin, a l’idée d’aller voir l’entreprise Leleu, un fabricant de vélos à Lomme, près de Lille. « Et si on mettait notre autocollant, ça vous dérangerait ? ». Pas du tout. Et Leleu est heureux de produire ainsi les premiers vélos mis en vente chez Decathlon. Un seul coloris existe alors, le gris. « Mais on proposait toutes les tailles, se souvient Benoît Poizat. C’était unique par rapport aux autres fabricants de cycles. Du marketing sans le savoir. Les vélos Decathlon gris métallisé, on les reconnaissait de loin. » Succès garanti, et qui va aller croissant.
Toute la philosophie de Decathlon est déjà exposée dans ces années pionnières. « On le faisait en 76 et on le fait toujours en 2016: prendre la défense de nos clients en s’appuyant sur nos valeurs, telle est la clef » traduit Benoît Poizat. « Dans notre métier, on est sûr que dans les huit jours qui suivent l’achat, notre client est dans un vestiaire, un stade. S’il est bluffé par nos services et nos produits, il va dire autour de lui que Decathlon est formidable. Le bricolage n’a pas de vestiaire, l’alimentaire n’a pas de vestiaire, le sport, si ! C’est un marché valorisant, porteur, mais on y a mis beaucoup de rigueur et d’exigence. Du débutant à la sportive de haut niveau, de l’enfant au retraité, le sport pour le plus grand nombre, ce n’est pas une incantation, c’est une réalité pour nous. » Avec les produits adaptés, confortables, sécurisants, répondant à une pratique précise, et, toujours, au meilleur prix.
Didier Decramer doit lui, dès l’été 1976, organiser son rayon équitation. « Personne ne m’a jamais dit ce que je devais proposer aux gens. L’offre, c’est moi qui la faisait. J’analysais chaque semaine les ventes pour voir si mon offre était pertinente. On avait un cadre pour savoir comment travailler avec un fournisseur mais après dans la négociation, j’étais libre. » Et toujours la prime à l’initiative pour séduire le client. « Avec mon break Renault 12, je suis parti à Walsall, près de Birmingham en Angleterre, là où se trouvait les meilleures tanneries de cuir. En Angleterre, la sellerie, l’acier, c’est le top pour l’équitation. Je me suis planté là-bas, j’ai pris un hôtel, j’ai consulté l’annuaire et j’ai noté les adresses des selliers. Je suis allé les visiter un par un. Des gens très gentils jusqu’au moment où je demandais des remises. Alors là mon anglais n’était plus valable, mais je savais que je rendais service à mes clients ! ». Il remplit son break de matériel et rentre dans le Nord, via Calais et la douane. « On ramenait ça le vendredi soir, on étiquetait l’ensemble toute la nuit et, le samedi matin, c’était en rayon. Et c’est moi qui calculais mes prix de vente. C’est dans l’action qu’on avance. »
Dix ans après l’ouverture d’Englos, Decathlon est déjà depuis longtemps la chaîne de magasins que Michel Leclercq a imaginée. En développant le même concept, en conservant les mêmes valeurs. La mise en place de Decathlon Production permet de développer enfin des produits conçus et fabriqués par l’enseigne, dix ans après les autocollants Decathlon posés sur les cycles Leleu. L’image de Decathlon se décline de nouveau dans la pub originale.
Autocollant et estafette de charcutier : depuis toujours, la proximité avec le client
En 1976, l’enseigne est inconnue et les encarts publicitaires dans la presse locale ne suffisent pas à toucher toute la clientèle. Pour acquérir de la notoriété au-delà du périmètre du centre commercial, l’innovation prime. Benoît Poizat : « On a fait fabriquer des autocollants pour portières de voiture avec la mention : ‘’Decathlon, domaine des sportifs, centre commercial Englos’’. » Des dizaines d’étudiants passionnés de sport sont contactés. « Ils ont collé l’autocollant sur leur voiture et ont leur demandait de le laisser pendant trois mois contre un bon d’achat de 50 francs. Le panier moyen était de 300 francs. Puisqu’ils était sportifs, on était sûr que leur voiture serait garée sur un parking de stade ou de club. On a eu 400 voitures avec l’autocollant : c’était de la notoriété pure. » Didier Decramer, responsable du rayon équitation, est tout aussi inventif pour exposer l’enseigne. « Mon père avait une petite entreprise de salaisons en charcuterie. Chaque dimanche j’empruntais sa camionnette pour me rendre à un concours équestre régional. Je passais le matin au magasin faire le plein de produits, puis je scotchais une publicité Decathlon 4 par 3 (4 mètres sur 3) sur les flancs du véhicule. L’estafette servait de cabine d’essayage. Je ramenais les invendus le dimanche soir et le lundi matin, on tapait en caisse les ventes. La capacité à faire les choses, à prendre des initiatives, c’est le ressort ! ».
Pourquoi Tarzan est-il devenu le premier héros publicitaire de Decathlon ?
Après le parrainage télé du bulletin météo de TF1, Decathlon se lance dans le cinéma avec le souci de produire un film publicitaire. Le premier coûte 1,5 millions de francs. « Ce ne fut pas une réussite » reconnaît Benoît Poizat, à l'époque en charge de la communication et de la publicité. Pour le deuxième, on lui annonce un budget de 3,5M : « C’était énorme ». L’agence de pub en charge de la réalisation propose un torture test naturel. « Ils ont très vite compris que ce que l’on avait de formidable et d’inégalable, nous Decathlon, c’était le produit. Ils me proposent un scénario où Tarzan fait une course dans la jungle avec un vélo Decathlon. Pont suspendu, lianes, et tout et tout. Tournage en Guadeloupe, grosse équipe de tournage, un truc canon. On me montre juste des dessins, des animatings. Je suis emballé mais comment le vendre à Michel (Leclercq) à un tel prix ? Michel, en homme spontané qu’il est, réagit vite mais à la réflexion il rationalise tellement… Il faut que je lui présente le projet à un moment où le spontané l’emporte.
Je cale avec lui un rendez-vous, tel jour, telle heure, à Paris en sachant qu’il a un timing serré car il prend ensuite l’avion. Il est au rendez-vous. Je le regarde pendant la projection. Il tranche, pressé : « Oui ça me plait ! » et file à l’aéroport.
Trois jours après, Michel me croise et me dit : « On pourrait peut-être tourner ailleurs qu’en Guadeloupe ? ». Je coupe : « Michel, ils tournent déjà ! ». J’ai été sur place pendant tout le tournage, j’étais un peu inquiet quand même : huit heures de tournage et deux secondes restituées. Il y a toujours quelqu’un qui dit que le nuage n’est pas au bon endroit. Moi, je voulais tout comprendre, décortiquer le coût et la réalisation. Quand notre film sort, j’appelle “La Nuit des Publivores”, qui se déroule au Ritz. J’arrive in extremis avec ma bobine. Le film doit passer à une heure du matin. La salle est bourrée d’étudiants. On envoie la pub. La salle l’applaudit : c’est gagné. On n’était pas encore très connu car nous n’avions pas beaucoup de magasins. Ce film Tarzan a marqué les esprits. »
Comment est né le slogan
“A Fond la Forme !”
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« Les femmes et les hommes de Decathlon sont toujours restés au centre du projet » insiste Didier Decramer qui, comme les autres, a sans cesse évolué dans l’entreprise, passant d’un métier à l’autre grâce à ses envies et aux formations proposées, d’un territoire à l’autre. « Ce que j’ai aimé dans tous les métiers que j’ai exercés, c’est la diversité » poursuit Gérard Allenet. « Comptable, directeur de magasin, directeur régional, contrôle de gestion. J’ai participé à la création de la marque Domyos. On a tous grandi avec l’entreprise. C’est unique. C’est aussi la recette du succès même quand nous sommes plus de 15 000 en France. » Ils étaient sept il y a 40 ans à prendre la bonne direction. « Notre start-up a 40 ans » disent en chœur Michel et Gérard en rigolant franchement et avant de conclure en forme d’au-revoir : “On se retrouve dans 40 ans pour souffler les 80 bougies de notre start-up !”
“ L’innovation et la conception, les secrets de notre start-up... ”
Rendez-vous en avril 2016 pour la suite de notre histoire...
#40ansDecathlon
Decathlon a-t-il tenté d’autres aventures
en dehors du sport ?
Oui. Dans le magasin d’Englos, en 1976, les clients découvrent un rayon… presse. « On y trouvait des quotidiens et des magazines, se rappelle Gérard Allenet, j’avais découvert ça en tant que client, c’était original. » L’expérience ne dure que quelques mois.
Les aventures que Benoît Poizat pilote à la fin des années 90 sont plus surprenantes encore : « En 1999, je rencontre Renault qui va sortir le Kangoo, un véhicule plutôt orienté loisirs. Renault voulait se servir de Decathlon pour faire de la pub. Je leur ai dit que ça ne m’intéressait pas. En revanche, je voulais rencontrer le chef de produit. J’ai mis trois mois avant d’avoir un rendez-vous et je lui ai finalement proposé de faire une série limitée pour Decathlon. Je l’ai invité à venir découvrir les coulisses de l’entreprise (la production, le bureau d’études, etc…) et il m’a passé une Kangoo prototype en me disant : « Faites-moi un projet ». On l’a réalisé en dotant le véhicule d’un certain nombre d’équipements liés au sport et ses pratiques. Puis, on a fait venir les gens de Renault à Campus. Ils ont été emballés. Il a été produit au total près de 45 000 véhicules. Nous avons conçu et créé des produits pour ce véhicule pour montrer qu’on était concepteur et créateur. » Le partenariat va durer deux ans.
Dans le même temps, Decathlon imagine lancer sa propre chaîne de télévision. Nous sommes en 1999. Toujours Benoît Poizat, alors responsable de la communication : « L’Equipe TV venait de lancer une chaîne d’informations sportives en continu. Nous, Decathlon, souhaitions être une chaîne de pédagogie sur le sport pour être fidèle au message de notre entreprise. » La chaîne est à deux doigts de s’appeler Decathlon TV… Par l’intermédiaire de Jacques Séguéla, Benoît rencontrera aussi Tim Newman, producteur britannique de la mythique émission musicale « Rapido ». Il développe un modèle de chaînes de marque. « On voulait produire une dizaine d’heures de programme hebdomadaires, diffusés depuis Londres. » Le projet restera finalement dans les cartons.
Pourquoi les vendeurs Decathlon
portent-ils un gilet ?
« Au début de l’histoire, le gilet Decathlon n’existait pas » se souvient Benoît Poizat. Dans le magasin, tout le personnel porte un badge « Sportifs satisfaits, c’est notre métier » pour être identifié par les clients. « On a essayé aussi une tenue qu’on avait pris dans le rayon vélo, elle était rouge et ça ne marchait pas. » Michel Leclercq, en discutant avec ses jeunes collaborateurs, décide d’en instituer pourtant le port. Mais il sera blanc avec les lettres bleues Decathlon dans le dos. « Un gilet fonctionnel avec des poches pour mettre un stylo et un carnet » précise Benoît. Et surtout pour être repéré par les clients. Il n’a pas quitté les épaules des collaborateurs en magasin depuis. Il est devenu un symbole mais a su évoluer. »
En 2012, il a subi un dernier lifting, avec l’apparition d’une ligne orange, rappelant la relation chaleureuse existante entre vendeurs et clients. Une petite révolution qui vient « chahuter » les couleurs traditionnelles dans l’ADN de la marque. « L’orange est une couleur qui fonctionne très bien avec le bleu. C’est sa couleur complémentaire au niveau des contrastes, de la visibilité. Comme le rouge et le vert. » raconte Julie Roger, designer Decathlon. « L’idée était de donner un petit peu plus de peps et cette valeur de vitalité qu’on a chez Decathlon va de pair avec la responsabilité. L’orange est juste surligné. On a toujours la dominante bleu et blanc. Au niveau du style, le gilet est beaucoup plus proche du corps maintenant. Pour les femmes, il est un peu cintré. Plus sport, quoi. » Toujours Decathlon, en somme...
Le logo Decathlon est-il le même depuis 1976 ?
Non. Il a évolué. « En lettres capitales et un mot assez long, cela faisait entreprise stable, très visible, transmettant une marque de confiance » décrypte Julie Roger, Branding manager au Design Hub de Decathlon. « L’apport d’un petit accident graphique dès le début entre le C et le A apporte du dynamisme et de la sportivité. »
Au virage des années 80, le logo perd le noir de ses lettres pour un blanc se détachant sur fond bleu. Celui-ci est plus clair que le bleu marine des débuts de Decathlon. La couleur, présente, dans l’architecture de l’entreprise (façades, barres de rayon, fenêtres, poignées de porte, etc.) s’impose. « Cela n’a pas d’abord été un choix émotionnel en se disant que le bleu c’est la mer, le ciel... on voulait que le mot soit lisible et visible » poursuit Julie. Le logo garde son style général immuable. « C’est le signe qu’il n’a pas pris une ride depuis des années. Beaucoup de marques ou d’entreprises reliftent leur logo pour satisfaire à la mode, avec du volume et du dégradé.
Aujourd’hui, la grande tendance est un retour au style le plus simple possible, le flat design. Des à-plats de couleur, un jeu de typographie de lettres bâton et droites. » Un peu, finalement, comme le logo Decathlon ;)
Comment est né le slogan
« A Fond la Forme ! » ?
En 1980, le publicitaire Jacques Séguéla, sentant l’engouement suscité dans le grand public par Decathlon, propose son agence pour développer la communication de l’enseigne. « Il est venu me chercher au premier rendez-vous avec sa Rolls-Royce rose » raconte Benoît Poizat, alors responsable de la communication et de la publicité.
Quelques mois plus tard, il se rend à Paris pour valider la campagne d’affichage. « La déclinaison proposée était : ‘’En mars, à fond le vélo ; en avril, à fond la rando ; en mai, à fond le tennis, etc… Je me dis que ce n’est pas vraiment le brief. Decathlon ce n’est pas le sport sueur et la compétition seulement, mais avant tout le sport loisir. Je ne suis pas emballé. Arrive l’affiche de septembre. Nous sommes à l’époque de Véronique et Davina et le fitness à la télé, et là, le slogan proposé est : “A Fond la Forme, Decathlon !”. Ça, c’est chouette ! Séguéla me dit : « On peut le mettre sur tout ! ». Je dis okay. C‘est devenu le caractère de l’entreprise.
Le slogan est né d’une conjugaison d’exemples. Je ne suis pas l’inventeur mais l’instigateur. A Decathlon, on n’a jamais aimé tout sous-traiter ; on préfère rester acteur de proposition. »